Guérande, la MEDIEVALE …
Si l’on en croit Honoré de Balzac, « Guérande, magnifique joyau de féodalité, n’a d’autre raison d’exister que de ne pas avoir été démolie ». Mais l’auteur des Chouans écrit cela en 1834 et il est vrai qu’à cette période, Guérande vit repliée sur elle-même, touchée par le déclin de la production de sel et n’ayant pas su se plier aux grandes mutations industrielles. Il faudra attendre la fin de la Seconde Guerre Mondiale pour que la « Carcassonne Bretonne » se souvienne qu’elle a encore quelques atouts en main.
Pour certains, l’origine de Guérande serait gallo-romaine (Granonna). Pour d’autres, plus nombreux, c’est au Moyen Age que la ville prend son essor. Son envolée est majoritairement due à sa position entre mer et Brière qui va lui permettre de produire une denrée absolument essentielle au Moyen Age : le sel.
Au début du XVème siècle, le port de Guérande est en pleine activité : un sur cinq des navires bretons recensés dans les ports britanniques est armé à Guérande. Ces bateaux, chargés de sel, naviguent vers Redon, Nantes et la côte atlantique participant, dans l’autre sens, au transport du vin de Bordeaux. A la fin du XVème siècle cependant, cette activité maritime va décliner rapidement : les Guérandais n’ont pas su résister à la concurrence plus audacieuse des ports paludiers voisins tels le Croisic et le Pouliguen.
Guérande reste connue aujourd’hui et au niveau national pour son sel même si une bonne partie des consommateurs serait sans doute bien incapable de situer géographiquement la Presqu’île.
Mais pour en revenir à notre propos qui est historique, ne l’oublions pas, il nous reste à parler de deux dates importantes, en pleine guerre de Cent Ans, qui font entrer Guérande dans l’histoire de Bretagne et, une fois n’est pas coutume, pour une bonne cause, la paix.
Le premier traité signé le 12 avril 1365 marque la victoire (relative) du Duc Jean IV de Montfort sur Charles de Blois et le parti français. Quelques mois plus tôt, le 29 septembre 1364, Charles de Blois a commis l’erreur d’attaquer le Duc qui tenait le siège devant Auray. Cette bataille fut un véritable carnage : selon les chroniqueurs anglais, l’armée de Charles de Blois laissait sur le champ la moitié de son effectif soit plus de 1 000 morts. 1 5000 blessés sont aussi dénombrés. Le plus grave, politiquement, c’est que Charles de Blois figure par mi les victimes. Froissart parle d’une « déconfiture moulte grande et moulte grosse ».
Le parti français ne pouvait donc que céder (Jeanne de Penthièvre se retrouve seule et le roi de France veut sortir au plus vite de ce guêpier). Pour le Duc de Bretagne, le traité est aussi une bonne affaire : il met fin à une guerre civile dans un pays exsangue et l’Anglais, Edouard III, est pressé de mettre un terme à ses expéditions armoricaines qui ne donnent pas grands résultats.
Notons au passage que le roi de France semble se résigner à une victoire « morale » des Anglais en Armorique mais que le traité de Guérande marque le retour de du duché dans la mouvance française puisque Jean IV doit prêter hommage à Charles VI (il s’agit d’un hommage simple et non d’un hommage lige …).
Inévitable donc, ce premier traité de Guérande, mais fragile et illusoire …
En 1368, les hostilités reprennent entre la France et l’Angleterre et Jean IV va tenter de louvoyer entre les deux souverains : il veut jouer la Bretagne pour elle-même. Les succès militaires du connétable de France, Bertrand du Guesclin, vont obliger le duc à d’exiler en Angleterre. Les années qui suivent vont se passer en débarquements successifs de Jean IV et des ses alliés anglais suivis de rembarquements plus ou moins précipités.
La noblesse bretonne n’est pas très accueillante pour son duc qu’elle juge trop « anglais » … et cela jusqu’en 1378, année où Charles V confisque le duché pour l’annexer à la couronne française.
Les Bretons ne veulent pas plus d’un Français que d’un Anglais : ils rappellent alors Jean IV qui est accueilli triomphalement à Dinard le 3 août 1379 (Jeanne de Penthièvre est au premier rang du comité d’accueil !)
Le roi de France meurt le 16 septembre 1680 et Jean IV signe avec son successeur le second traité de Guérande, le 6 avril 1681. Il est alors reconnu duc de Bretagne et fait une allégeance de pure forme au roi de France. Le duc jure en contrepartie de s’opposer aux Anglais dans leurs prétentions hexagonales et s’engage à verser à la France une indemnité de 200 000 francs.
Ce second traité de Guérande marque donc la fin d’une période troublé pour la Bretagne et le début de ce que bon nombre d’historiens ont appelé « le grand siècle des Ducs ».